Avec Bas Jan Ader

Il y a des fantômes qui nous ralentissent, et d’autres qui nous poussent et nous accompagnent sur le chemin. Pour Bas, l’image du père s’est figée et floutée lorsqu’il avait deux ans. Il n’a pas de souvenirs à invoquer. Il n’y a que les quelques photographies existantes et le visage sec et triste de sa mère. On ne lui a jamais raconté comment le corps paternel s’est arrêté de vivre ce matin-là mais la fulgurance de la chute est palpable.
Tel un oiseau, l’aile a cassé net et le sol s’est soudain rapproché jusqu’à ce que son visage s’incruste dans la terre humide. Dès l’enfance, Bas cherche le sens de sa vie et est fasciné par ces moments où l’on passe du déséquilibre à la chute. Ce fragile funambule teste, analyse, provoque l’abandon avec beaucoup de distance et d’élégance. Lorsqu’il se lance avec détermination dans une traversée de l’Atlantique, il sait que c’est l’ultime impulsion qui peut changer le cours des choses.
Avec Bas, Thomas Giraud s’empare à nouveau d’une de ces vies extraordinaires et insaisissables, avec ses mots tendres et sensibles, et nous rappelle que dans la chute, le moment le plus passionnant est toujours celui où on se relève. 

Marianne Schæffer