Les trois petits cochons

En matière de livres animés, la littérature de jeunesse innove sans cesse, proposant des expériences visuelles, tactiles, sonores, interactives, immersives, grâce à des procédés techniques, graphiques et hautement artistiques. Papiers découpés, lecture déployée, images en mouvement, calques colorés, illustrations en relief, le livre ose tout. Ce dernier-né revisite un grand classique sous la forme d’un album fantasmagorique. Mélanie Baligand, formée à l’école des Gobelins, puis plus tard à l’ingénierie papier, rassemble, dans cette version des Trois petits cochons, ses passions pour le cinéma, la magie et le livre pour enfants. Sorte de lanterne magique, l’ouvrage s’impose déjà par son format et sa maison pop-up au centre des doubles pages au cœur de laquelle on glisse son téléphone en mode lampe-torche. Le toit de la maison de papier, ciselé, dessine en creux la destinée des trois porcelets et du célèbre méchant loup. Et là, dans l’obscurité de la chambre, sur le plafond et sous les yeux ébahis, le petit théâtre d’ombres s’anime. Les silhouettes rebondies, la joie des bâtisseurs, le souffle retentissant et la peur qui grandit… le récit s’expose et prend vie. Les images, projetées et agrandies, transforment le plafond en écran et la lecture en spectacle. Si le procédé est ancien et semble désuet (en comparaison aux nombreuses propositions numériques), le lecteur-spectateur est d’autant plus fasciné qu’il s’agit d’un livre papier, avec sa fragilité et sa trompeuse simplicité. De jour, l’album reste d’une grande beauté. Préparez-vous à souffler et souffler… pour préparer le sommeil en chuchotant dans le noir ou au contraire à faire rugir votre voix, bouillir la marmite et rire aux éclats pour prolonger le rituel du soir !
Lucie Charrier