LE BILLET DE CLAI(RELOU)P – Apparence X appartenance
Déjà à l’époque où j’étais au lycée – en l’an 400 avant J-C – apparence et appartenance étaient liées : il y avait les gothiques, les artistes déguenillés, les sportifs, les branchés à la pointe de la mode… C’était tellement net, tellement codifié, ça manquait si peu de subtilités qu’il était plutôt aisé de choisir son camp.
Il y avait aussi un clan (dont je suis certaine qu’il existe toujours) : le clan des rien, composé de celles et ceux qui ne savaient pas trop trancher, qui étaient juste déguenillés sans le côté artiste (coucou !), ou qui avaient toujours un détail foireux dans leur tenue qui les empêchaient – de peu – de faire partie des branchés (coucou !) J’avais hâte de grandir pour passer à autre chose, qu’on arrête enfin d’être (et de se) catalogué en un clin d’œil. Est-ce que la vie d’adulte m’a comblée ? Non. Parce que la vérité, c’est qu’on déplore chez les ados un phénomène qui en réalité se poursuit toute notre vie : entre adultes, le même manège continue – avec moins de gothiques au quotidien, certes. Quand on sort boire une bière ou qu’on accompagne nos enfants à l’école, le scanner est toujours là – pas besoin d’avoir 14 ans et Instagram pour ça : on continue à se renifler le costume pour savoir qui est bobo, catho, intello, prolo… Et c’est vrai qu’il y a quelque chose de déprimant là-dedans, à se dire que toute notre vie, notre style nous catalogue, nous fait rentrer dans une case, donne immédiatement à l’Autre à penser quelque chose de nous, de plus ou moins vrai, de plus ou moins assumé. Mais rassurez-vous, tout ça finit par s’arrêter – le jour où on se retrouve toutes et tous débraillés en robe de chambre dans un Ephad, youhou ! Hâte !
Claire LOUP