19
septembre
2023

SÉPARATION : FAIRE AU MIEUX POUR L’ENFANT (ET POUR SOI)

Moment délicat de la vie familiale, la séparation demande certes des démarches administratives mais aussi de désamorcer les conflits dans l’intérêt commun et surtout dans celui des enfants. Nous sommes donc allés à la rencontre d’Alexis Kerdoncuff, responsable de Cap FamilleS, un service de soutien et d’accompagnement à la parentalité (service issu de l’association de la protection de l’enfance Linkiaa).

Quels sont les services proposés par votre association ?
Nous avons la médiation familiale ou la médiation parents/ado. Nous proposons également des ateliers de paroles pour les enfants de parents séparés. Dernier service, nous accueillons aussi les familles dans des espaces de rencontre lorsque le conflit est avéré et a pris des dimensions plus problématiques… C’est financé par la Caf, la ville de Nantes, Saint-Nazaire et quelques autres communes, la MSA, la Justice et le Département mais seulement sur le volet solidarité pour ce dernier.

Qui peut faire appel à vous ?
Tout le monde. La plupart du temps, ce sont des parents en séparation mais nous pouvons aussi intervenir par rapport à d’autres types de conflits familiaux. Entre parents et grands-parents par exemple. On fait aussi de la médiation intergénérationnelle. Nous sommes là pour ne pas rompre le lien familial et éviter les conflits de loyauté chez l’enfant.

À quel moment vous solliciter ?
Quand il y a du conflit, et même si la séparation n’est pas encore un sujet… Quand on n’arrive pas à s’entendre ou à trouver des solutions ensemble, la médiation familiale va permettre de saisir une tierce personne pour aider à recommuniquer, à trouver des solutions. On n’est pas là pour amener des solutions toutes faites, on est là pour amener les (ex)couples à se saisir des solutions qu’ils ont en eux et de les coconstruire en tant que parent. Plus forcément en tant que couple mais de parent. Il y a plein de choses dans la vie qui font que tout à coup la communication est rompue mais qui en pâtit ? Les enfants ! Surtout s’il y a de la violence verbale. On est aussi là pour éviter ça. En revanche, quand il y a de la violence conjugale, on n’intervient pas.

Jamais ?
Jamais. La médiation familiale est interdite dans la loi en cas de violence conjugale. C’est la justice qui prend ça en charge.

En cas de séparation, concrètement, vous travaillez sur quel type de conflits ?
Il y a le mode de garde, bien sûr, mais les plus gros conflits sont souvent d’ordre financier : séparation des biens, pension alimentaire… Parfois même, les gens viennent (ou reviennent) dix ans après leur séparation. Ce sont des personnes qui reviennent car ils ont besoin de renouveler les accords, les enfants ont grandi et les histoires de vie ont évolué, il y a mésentente sur la pension qui n’a pas été revisitée. Entre les réalités financières des gens et les besoin des ados… les choses changent. Les questions d’orientation peuvent aussi être abordées. Mais, je le redis, les parents doivent être acteurs pour trouver des solutions conjointes, des résolutions. Le médiateur n’arrive pas avec des solutions toutes cousues. Il est juste un facilitateur de communication, neutre. Il a vraiment une éthique autour de la neutralité…

Et donc dans l’intérêt de l’enfant…
Oui, l’idée est que chaque parent garde sa place sans que la figure d’attachement de l’enfant soit troublée, qu’il se sente en insécurité ou qu’il se retrouve dans un conflit de loyauté. On met tout en place pour préserver l’éducation des enfants. Leur bien-être. Sans vouloir stigmatiser, une séparation, à un moment donné, ça peut donner des chocs post-traumatiques chez les enfants. Ils se retrouvent face à des « Ta mère, elle a dit ça ». « Ton père, il est comme ça »… Ça se passe très souvent et ce n’est pas bon pour l’enfant. On invite donc les parents à venir régler leurs conflits ailleurs que devant leurs enfants et trouver des solutions.

Les enfants n’interviennent jamais ?
Jamais. Si l’enfant a besoin de parler, nous avons des ateliers de paroles. Ce sont des groupes d’environ 6 enfants, sur 3 ou 4 séances. Ça passe par le dessin, le modelage, des petites saynètes. Il y a deux intervenants sur les deux heures. À la 4e séances, ils font une restitution aux parents sous forme de vernissage. Ils font ainsi passer les messages qu’ils ont envie de dire. Là, on voit souvent que les parents n’ont pas conscience de ce que leur conflit procure chez l’enfant. Il y a donc des choses intéressantes qui se passent. Notamment, les représentations que les enfants ont de leur famille.
En 2024, on espère développer des ateliers de parole de parents. Entre père par exemple.

Et alors, la médiation familiale, ça se passe comment ?
La première séance est un entretien d’information gratuit. On y pose les problématiques mais surtout on explique comment on procède. On conseille de faire entre 2 ou 5 séances pour faire un vrai travail. Après, ça dépend aussi de la problématique (séparation , justice). Aujourd’hui, lorsque des parents se séparent, qu’ils soient mariés ou non, ils doivent travailler des accords co-signer un contrat pour valider la garde, le montant de la pension, la division des biens… qu’ils intégreront à la plateforme dédiée. Notre travail est, en résolvant les conflits, de formuler ces accords et d’aider à les rédiger. Les axes sont validés ensuite par la justice. Ce sont des orientations du ministère de la justice.

Votre service est payant ?
On est agrémenté par la Caf donc c’est en fonction des revenus, selon le quotient familial. Cela signifie qu’on démarre à 2 € la séance et l’entretien d’information est donc gratuit.

Si un parent n’accepte pas la médiation, qu’il vient mais refuse le processus ?
Ça peut arriver, il vient une fois seul ou avec l’ex conjoint puis il déclenche généralement l’avocat et le reste sans avoir cherché plus loin. Certaines personnes veulent continuer à alimenter le conflit mais ce n’est pas la majorité. On essaye toujours de faire comprendre conscience de l’impact sur les enfants. Certains oublient même qu’il y a des enfants et ne voient que leur personne. Ils peuvent voir aussi une forme d’intérêt de défendre l’enfant mais ils ne voient pas le mal qui est en train de lui être fait. La séparation n’est jamais anodine. Entre le sentiment d’abandon, l’incompréhension face à l’arrivée d’une nouvelle personne etc., l’enfant est dans une place compliquée si ce n’est pas accompagné, si les parents ne tirent pas les choses vers le haut.

Vous disiez aussi intervenir en médiation parent/ado ?
Oui, on a de plus en plus de demandes sur des conflits parent/ado. Par exemple, un jeune qui ne veut plus parler à son père ou sa mère, ou des jeunes qui sont sur les questions de leur identité et dont les parents ne comprennent pas. C’est vraiment un phénomène de société et comment on met ça au dialogue quand le jeune ne peut pas s’exprimer dans le cadre privé ? En mettant une tierce personne, ça permet d’éviter l’engueulade et l’adolescent ou pré-adolescent va se sentir écouter et trouver une aide pour porter sa parole.

Vous travaillez avec la maison des ados ?
Oui, on prend le relai. Quand ils ne sont pas déjà dans un processus autre à la MDA, ils sont renvoyés vers nous sur ces questions. On est présent à Saint-Nazaire, à Nozay, à Basse-Goulaine et à Nantes.

Il y a beaucoup de structures comme la vôtre sur le territoire ?
À Nantes, il y a L’AAERF à Saint-Herblain mais qui intervient également à Châteaubriant, Ancenis.

J’habite Clisson, je peux venir à Nantes ou ailleurs ?
Bien sûr ! Peu importe où vous habitez, ce n’est pas territorialisé.

Pour conclure, j’envisage une séparation mais je suis démunie en termes de procédures, d’aides… où je m’informe en premier lieu ?
Sur le site de la Caf, vous avez toutes les réponses possibles. C’est plutôt bien fait, sous forme de questions. « Je divorce, comment ça se passe ? » « Il ne veut pas payer de pension alimentaire »… maintenant, il y a des pensions de réversion, on n’a plus besoin de se battre. La Caf paye et se débrouille avec le parent qui ne veut pas payer. Sur la Caf.fr ou monenfant.fr, il y a tout ce qu’il faut. C’est bien d’aller s’y informer aussi avant d’aller voir un avocat, le cas échéant.

Propos recueillis par Valérie MARION

linkiaa.fr
Caf.fr

monenfant.fr
aaerf.fr
mda44.fr


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